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Tenir la rue, dans Les Cahiers d’Alter

mardi 4 novembre 2014 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Article publié dans le numéro 69 (20 octobre 2014) des Cahiers d’Alter.

C’est un livre d’histoire qui se lit comme un roman policier. Matthias Bouchenot a traqué dans les archives les indices de ce qu’a été l’autodéfense dans les années 1930 à la SFIO, l’ancêtre du Parti socialiste. Elle recouvrait la protection des manifestations (service d’ordre), des réunions publiques, des locaux et des ventes de journaux. Mais la gauche du parti vit alors dans la certitude que l’alternative, c’est « socialisme ou fascisme ». Le 6 février 1934, une manifestation d’extrême droite tourne à l’émeute et fait craindre un coup d’État fasciste. L’autodéfense a donc aussi pour rôle d’empêcher physiquement l’extrême droite d’occuper l’espace public par l’action directe de la classe ouvrière. Sont créés en Île-de-France les TPPS, « Toujours prêts pour servir » : des centaines de personnes, surtout des ouvriers et employé-e-s, bien organisé-e-s et chargé-e-s de ces activités. La première partie du livre retrace les débats sur l’autodéfense. Dans les deux autres, les plus passionnantes, l’auteur reconstitue, dans un style très agréable, les activités de ces groupes : qui ils étaient, comment ils préparaient leurs actions, comment ils s’organisaient… Des annexes, avec notamment des photos et dessins, permettent de visualiser les choses. C’est aussi la période du Front populaire, qui décrète rapidement une pause dans les réformes. Se creuse la fracture entre le gouvernement et les partisans d’un Front populaire de combat, parmi lesquels les animateurs de l’autodéfense. La gauche du parti est exclue en 1938, ce qui signe la fin des TPPS. Montée de l’extrême droite, trahisons d’un gouvernement de gauche… l’histoire ne se répète jamais et le livre ne fournit pas de solutions pour aujourd’hui. Il donne cependant à réfléchir sur les moyens, finalités et écueils de la violence politique.

Ella Brik